Par Didier Hubert Madafime avec la contribution de Friday Phiri
On dit souvent que l’environnement et la santé sont les deux faces d’une même médaille. L’interdépendance entre l’environnement et la santé ne peut plus être ignorée, car les preuves scientifiques ne cessent de souligner qu’un environnement mal géré est la recette d’une augmentation de la charge de morbidité à travers le monde.
Par exemple, un mauvais assainissement est l’une des principales causes de maladies liées à l’eau, tout comme l’augmentation de la résistance aux antimicrobiens et des cancers résultants d’une mauvaise gestion des produits chimiques et autres déchets dangereux.
Conscients de l’interaction entre la santé et l’environnement, les experts de l’environnement et de la santé ont travaillé pour promouvoir le concept « une seule santé », une approche intégrée et unificatrice qui vise à équilibrer et à optimiser durablement la santé des personnes, des animaux et des écosystèmes.
Ainsi, la santé des humains, des animaux domestiques et sauvages, des plantes et de l’environnement au sens large (y compris les écosystèmes) sont étroitement liés et interdépendants.
Alors que la santé, l’alimentation, l’eau, l’énergie et l’environnement sont tous des sujets plus vastes avec des préoccupations spécifiques à un secteur, la collaboration entre secteurs et disciplines contribue à protéger la santé, à relever des défis sanitaires, tels que l’émergence de maladies infectieuses, la résistance aux antimicrobiens et la sécurité alimentaire et à promouvoir la santé et l’intégrité des écosystèmes.
En reliant les humains, les animaux et l’environnement, l’initiative « One Health » peut contribuer à aborder l’ensemble du spectre du contrôle des maladies ; de la prévention à la détection, à la préparation, à la réponse et à la gestion – et contribuer à la sécurité sanitaire mondiale.
L’approche peut être appliquée au niveau communautaire, infranational, national, régional et mondial, et repose sur une gouvernance, une communication, une collaboration et une coordination partagées et efficaces. La mise en place de l’approche « One Health » permet aux gens de mieux comprendre les co-bénéfices, les risques, les compromis et les opportunités pour promouvoir des solutions équitables et holistiques.
Conséquence d’une mauvaise gestion de l’environnement, le changement climatique est devenu une menace majeure pour la santé mondiale, les populations les plus vulnérables étant les plus touchées. Malheureusement, ceux qui contribuent le moins au problème en subissent souvent les conséquences les plus graves.
On estime qu’environ 824 millions de personnes dans le monde souffrent de malnutrition, dont 58,7 millions d’enfants en Afrique. De plus, des millions de personnes en Afrique manquent d’eau et d’assainissement de base, ce qui entraîne une mortalité infantile importante due à la diarrhée.
On estime en outre que 58 % des maladies infectieuses dans le monde ont été intensifiées par les changements climatiques. Cela a des répercussions sur la santé publique, l’économie, l’environnement et l’éducation.
La situation devrait s’aggraver avec la hausse des températures mondiales, menaçant les progrès vers les objectifs de développement durable (ODD) et la couverture sanitaire universelle.
Le sixième rapport d’évaluation du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) prévient que le changement climatique affecte à la fois la santé physique et mentale et peut exacerber les crises humanitaires, et reconnaît la nécessité d’agir.
Le paragraphe 2 du rapport susmentionné indique : « Des mesures d’atténuation profondes, rapides et durables ainsi qu’une mise en œuvre accélérée des mesures d’adaptation au cours de cette décennie réduiraient les pertes et les dommages projetés pour les humains et les écosystèmes, et apporteraient de nombreux co-bénéfices, en particulier pour la qualité de l’air et santé.
Ainsi, plusieurs efforts sont en cours pour intégrer la santé dans le discours formel de la CCNUCC et pour obtenir une influence politique sur le lien entre le changement climatique et la santé.
En reconnaissance de l’importance de la santé et pour que la COP28 reconnaisse les impacts déjà graves et croissants du changement climatique sur la santé humaine, la présidence de la COP28, en collaboration avec l’Organisation mondiale de la santé (OMS) et d’autres partenaires, a organisé la toute première journée de la santé de l’histoire des COP, le jour 4 de la COP28 (3 décembre 2023).
La journée a réuni les ministres de la Santé et les délégués de la santé de plus de 100 pays. La conférence ministérielle avec le soutien de l’agenda climat et santé de la COP28 et la « Déclaration de la COP28 sur le climat et la santé » qui a été dévoilée le 2 décembre lors du Sommet mondial action climat et approuvée par plus de 120 pays et plus d’un milliard de dollars de financement pour la santé climatique ont été bien accueillis par les partenaires.
S’exprimant ce jour-là, l’ambassadeur Al Suwaidi, directeur général de la COP28, a déclaré : « Tandis que nous construisons le système énergétique de demain, nous ne pouvons ignorer les besoins des gens d’aujourd’hui. Nous devons rapidement protéger et promouvoir leur santé et leur bien-être tout en améliorant la résilience climatique des systèmes de santé et en réduisant les risques climatiques pour la santé.
« Protéger les vies et les moyens de subsistance » est l’un des quatre piliers centraux du programme d’action de la présidence de la COP28, axé sur les personnes, la nature, les vies et les moyens de subsistance. L’AMREF Health Africa, en collaboration avec Africa CDC, Wellcome Trust, la Fondation Rockefeller, l’Alliance panafricaine pour la justice pour le changement climatique (PACJA) et d’autres, a organisé plusieurs événements avec les parties prenantes afin qu’elles apportent le soutien au lien entre la santé et le changement climatique.
Les événements visaient à établir un consensus entre les ministres de la santé en Afrique sur les principales propositions et la position commune à présenter lors des différentes sessions de la COP, ainsi qu’à s’engager avec le Groupe africain de négociateurs et les dirigeants politiques pour faire avancer les principales propositions sur les différents axes de travail de négociation à la COP28.
Lors de la table ronde des ministres africains de la santé, le directeur général (PDG) de l’AMREF Health Africa, le Dr Githinji Gitahi, a appelé à une participation active des ministres de la Santé à la problématique sur le changement climatique.
« C’est incroyable que nous soyons ici aujourd’hui. Nous remercions la présidence de la COP28 d’avoir consacré une journée de la santé à la santé climatique – la première dans l’histoire des COP. Nous apprécions également les efforts inlassables de l’OMS, des ministres de la Santé et d’autres acteurs clés de la santé mondiale, les partenaires, pour faire de la Journée de la santé une réalité », a déclaré le Dr Githinji.
Et le secrétaire exécutif de la CCNUCC, Simon Stiell, a souligné l’importance de reconnaître l’interaction entre le changement climatique et la santé. “La santé est le visage humain du changement climatique”, a-t-il déclaré. “L’air que nous respirons devrait être exempt de pollution nocive.
Nos communautés devraient être à l’abri des effets dévastateurs des inondations, des sécheresses et des vagues de chaleur. L’abandon des combustibles fossiles peut nous aider à y parvenir.”