Par Didier Hubert MADAFIME
Il n’est pas possible d’avoir un chiffre exact de personnes décédées, à la fin des opérations de sauvetage du séisme d’une magnitude de 7,8 sur l’échelle de Richter, qui a frappé la Turquie le 6 février 2023.
45.000 morts ou plus, l’ONU (Organisation des Nations-Unies) dit s’attendre à ce que ces chiffres augmentent encore considérablement au regard de l’étendue des dégâts causés par ce tremblement de terre. Et lorsque Recep Tayyip Erdogan a fini par se rendre sur les lieux du sinistre, le Président Turc a commis une bourde qui a certainement échappé aux médias, je cite : « un tel évènement, il n’est pas possible de le prévoir ».
Une bien subtile façon de noyer le poisson. On peut, on peut bel et bien le prévoir. Ce qui manque aujourd’hui pour mieux faire face à un risque naturel comme les séismes, c’est la difficulté à mesurer à juste titre l’ampleur et son intensité.
Cela échappe, pour le moment à toutes les technologies, modélisations et prévisions. C’est d’ailleurs le seul palier qui reste à franchir pour maitriser les conséquences des catastrophes.
Par conséquent, si on ne peut pas réduire la probabilité des catastrophes comme les séismes, il est par contre possible d’assurer la prévention de leurs dégâts, ce qui est le seul moyen d’assurer la gestion de leurs risques.
Au pouvoir depuis 2014 Recep Tayyip Erdogan et ses amis du Parti de la Justice et du Développement n’ignorent certainement pas ce principe. Ils savent qu’une partie de la Turquie est située dans une région à fort risque sismique.
Le 17 août 1999 dejà, le séisme qui a frappé Izmit, le nord-ouest de la Turquie, avait fait, au bout de 45 secondes à l’époque 17480 morts et environ 10000 disparus. Après une vingtaine d’années le monstre est revenu, encore plus violent en 2023.
Le niveau de préparation face à lui étant faible, onze provinces de la Turquie densément peuplées ont été pratiquement rayées de la carte avec des victimes et des vies brisées. Le cratère de plusieurs kilomètres laissé derrière lui, témoigne de la force et de l’impact du phénomène.
De toutes les façons, en matière de risques naturels, il n’y a pas de certitude. Les japonais peuvent le témoigner. La centrale de Fukushima a été dévastée par une vague de 12 mètres à la suite du séisme du 11 mars 2011 alors que le mur érigé censé protéger ce joyau n’était que de 8 mètres.
Pendant longtemps, il a été dit au Béninois qu’ils ne doivent pas craindre un séisme. Pour ceux qui défendaient cette thèse, le Bénin est situé sur une plaque tectonique stable au niveau de l’équateur, sauf que certaines zones du Bénin ont subi de faibles secousses successivement, le 11 septembre 2009 vers 2h du matin et le samedi 8 août 2015 aux environs de 16h. Or les risques naturels sont comme les « assassins ».
Le propre de ceux-ci, est de revenir toujours sur leurs lieux de crimes. Avec le réchauffement climatique, il faut s’attendre donc à ce que le sol béninois tremble à nouveau un jour ou l’autre..
Séisme en Turquie : A qui la faute ?
A la nature certes mais dans un pays comme la Turquie point n’est besoin de chercher loin. Certains promoteurs immobiliers dorment déjà en prison, les seconds couteaux aussi. Les premiers pour avoir construit des bâtiments et immeubles qui se sont effondrés comme des châteaux de carte.
Or, les zones concernées étant auparavant identifiées comme des zones dangereuses, qui a donc délivré les permis de construire ou autoriser les constructions sans tenir compte de la vulnérabilité de la zone au séisme ? Quels sont les mécanismes pour alerter les populations en cas de risque ? Comment accompagner les populations dès les premières heures de la crise ? En plus, l’Agence Nationale de Gestion des catastrophes de la Turquie avait-il un plan de gestion des risques ? Le monde entier a vu, les survivants ont tout simplement été abandonnés à leur sort.
Des mesures pour contenir les risques naturels
Le séisme qui a dévasté une partie de la Turquie est sans nul doute une alerte. Tous les pays doivent mettre en place un mécanisme pour minimiser les conséquences potentielles dues à certaines catastrophes.
Dans ce registre, le Cadre d’action de Sendai prend tout son sens. Il détermine pour les pays les actions prioritaires à mettre en œuvre pour réduire de façon substantielle les risques de catastrophes et de pertes en vies humaines, en termes de niveau de vie et de santé.
Il s’agit dans ce cas de comprendre les risques de catastrophes, de renforcer la gouvernance des risques de catastrophes pour mieux les gérer, d’investir dans la réduction des risques de catastrophes pour la résilience, de renforcer l’état de préparation aux catastrophes pour une réponse efficace et pour « mieux reconstruire » durant la phase de relèvement, de remise en état et de reconstruction.
C’est vrai, il n’y a pas de risques zéro lorsque survient une catastrophe mais un plan, une stratégie robuste permet de limiter les dégâts. Ce qui a manqué aux autorités turcs.
Séismes, éruptions volcaniques, inondations, canicules, feux de végétation, mouvements de terrain, tempêtes, cyclones, tsunami, sècheresse, il est donc important de diminuer les facteurs de risques par des mesures de prévention.
Les populations qui ont été touché dans ce séisme auront du mal à pardonner à leurs dirigeants les négligences dont ils ont fait preuve même avec la promesse de reconstruire les zones touchées. C’est ce que je crois.