On regroupe sous ce vocable, le bois : gros et petit, les résidus des récoltes, les bouses de vache, les rafles de palmier, les tiges de coton, les déchets issus des intestins des bœufs, les balles de riz, la bagasse (les extraits des déchets d’une production), bref, tout ce qui est organique, constitué de carbone et d’hydrogène. C’est la source d’énergie la plus accessible pour les pays en voie de développement. C’est bien évidemment, celle qu’on peut produire sans aliénation, qu’il y ait ou pas la guerre en Ukraine. Dans le bilan énergétique du Bénin, il est établi que plus de 60% de l’énergie utilisée provient de la biomasse, essentiellement orientée vers sa forme d’utilisation traditionnelle. Les pays de la sous-région de l’Afrique de l’ouest sont presque dans ce même schéma. Comment passer de la biomasse à l’électricité dans un contexte de changement climatique ?
Une enquête de Didier Hubert MADAFIME
La biomasse, le commun des mortels, la classe souvent dans les sources traditionnelles de l’énergie, c’est-à-dire, celle qui n’a pas de valeur. Tel n’est pas l’avis du GIEC. Le Groupe Intergouvernemental des Experts sur l’évolution du Climat estime, dans le rapport spécial sur les sources d’énergies renouvelables et l’atténuation des effets des changements climatiques, que, jusqu’à 77% des besoins énergétiques mondiaux pourraient être couverts par la biomasse, le solaire, l’éolien, l’hydroélectricité, la géothermie et les énergies marines, à condition d’une forte volonté politique.
En proclamant 2012, l’année de l’accès à l’énergie pour tous, les Nations-Unies, rappellent l’importance d’un accès universel à une énergie, qui soit propre, sûre, fiable, viable à long terme, abordable et qui contribue au développement durable. La biomasse remplit, en effet, tous ces critères.
A cause de la place qu’elle prend chez les populations, surtout rurales, on peut, à juste titre considérée la biomasse comme une énergie du pauvre. D’ailleurs, les économistes devraient définir autrement la pauvreté. Elle ne doit pas être associée au manque d’argent. La vraie pauvreté, c’est lorsque la biomasse nécessaire à la satisfaction des besoins essentiels quotidiens n’est pas disponible en quantité suffisante. Dès lors, le produit naturel brut doit être plus significatif que le produit intérieur brut.
Il faut passer alors, à la modernisation des techniques de combustion de la biomasse.
Selon les enquêtes de consommation réalisées au Bénin, (PFSE, 2012, conception et mise en place d’un système d’information pour l’évaluation permanente (SIEP) de l’évolution du sous-secteur des combustibles domestiques : Description de la situation de référence du sous-secteur des combustibles domestiques dans le cadre de la mise en place du SIEP: TOME1, MINISTERE DE L’ENERGIE DES RECHERCHES PETROLIERES ET MINIERES RENOUVELABLES, DFS, EDD, ZÉBRA-INFO, 226 P), tous les ménages consomment 100% le bois-énergie, même ceux qui font des cuisines raffinées.
Ils combinent souvent le bois avec toutes les autres sources d’énergie, notamment, le gaz avec le bois ou le charbon de bois, le pétrole avec le bois ou le charbon de bois. Conséquence, il y a, actuellement une tendance baissière de la production de bois dans les bassins d’approvisionnement du bois-énergie en raison de l’augmentation de la population.
Il s’agit désormais de répondre à des besoins concrets dans le domaine de l’énergie. Cela passe par la recherche et la maitrise de la sylviculture avec des techniques d’optimisation des croissances et une amélioration génétique des sélections variétales en vue de produire des plans avec un potentiel de croissance élevée.
Dans le cas d’espèce, l’accent peut être mis sur des plantes endogènes à fort potentiel, comme AnoGeissus (hlinontin), prosopis (kakètin) ou le Uapaca, etc. Et comme le suggère l’Expert en énergie Krystel Dossou, « la meilleure manière de faire face à la situation est de produire du bois-énergie en quantité suffisante sur des espèces à bon pouvoir calorifique suivant des techniques sylvicoles ou des traitements appropriés ». « Il faut, pour les pays en voie de développement faire des choix modernes de consommation de la biomasse ». Il cite en exemple le cas français.
Ces derniers utilisent aujourd’hui des formes modernes , les palettes et les granulés pour chauffer leurs maisons et autres besoins surtout dans le contexte actuel de l’élévation exponentiel des prix du Gaz. « Le dos au mur, il est certain, les africains iront vers ces formes modernes de consommation de la biomasse ou des formes variées de biomasse autres que le bois comme le biogaz à partir de résidus agricoles ou mêmes à partir des déchets animaux ».
Il faut aussi réduire la consommation des ménages par l’adoption de technologies de consommation telles que les foyers économiques performants (mais accessibles et socialement acceptés). Les grands consommateurs de bois-énergie (gargoteries, maquis, prisons, hôpitaux, etc.) doivent adopter également des mesures d’efficacité énergétique de processus de conversion de bois en chaleur.
Perspectives, vision future
Le mix-énergétique sera dessiné en fonction de la capacité et de la volonté politique des dirigeants africains de chaque pays, notamment, ceux de la sous-région ouest-africaine. Conformément aux engagements de l’accord de Paris sur le climat, certains seront prêts à échéance échue, d’autres non.
De toutes les façons, l’énergie utilisée aujourd’hui par la plupart de ces pays, à savoir les énergies fossiles, n’ont plus d’avenir et il va falloir les débrancher un jour ou l’autre, en vue de donner une chance au système climatique de se régénérer. Cela dit, le mix-énergétique est long à définir. En réalité, celui des pays africains n’est pas si mauvais comparé à celui des européens. La biomasse apparait, donc, comme une alternative crédible. Mis à part, toutefois, les pays de l’Afrique du Nord, rares sont ceux au sud du Sahara, qui dispose d’un système électrique digne de ce nom.
Todeman Assan, l’admet. Il est le Directeur Général des Ressources Energétiques du Ministère de l’Energie du Bénin. Il reconnait que « la question de l’énergie en Afrique ne peut pas être réglée sans une politique qui intègre la biomasse dans le mix-électricité dans la mesure où elle évite la concurrence avec les autres usages».
Conclusion
A l’heure actuelle, sur le continent africain, l’accès à l’énergie reste inéquitable pour la grande majorité des populations. Les différentes filières de valorisation énergétique de la biomasse se présentent comme un avantage certain pour le développement durable de ce continent. En effet, ce sont des solutions qui peuvent être implémentées progressivement sur de petites et moyennes échelles, de manière décentralisée et en tenant compte des spécificités locales de chaque région ou localité.