Responsables d’ONG dans le secteur de la biodiversité, tradi-praticiens, autorités locales de certaines régions du Bénin et détenteurs des connaissances locales se sont donné rendez-vous à l’hôtel « les Palais Royaux », à Abomey-Calavi au Bénin, du mardi 12 au mercredi 13 juillet 2016 pour échanger sur le contenu du protocole de Nagoya.
C’est à travers deux jours de réflexion consacrés à la promotion des connaissances et savoirs traditionnels et l’utilisation coutumière durable pour la conservation de la diversité biologique. Les travaux ont été placés sous le parrainage du Ministère du Cadre de vie et du Développement durable et c’est le Point Focal Biodiversité qui a donné le coup d’envoi des activités.
Les discussions ont tourné autour de deux articles de la Convention sur la Diversité Biologique. Il s’agit des articles 8j et 10c.
Le premier stipule que «sous réserve des dispositions de sa législation nationale, chaque pays, respecte, préserve et maintient les connaissances, innovations et pratiques des communautés autochtones et locales qui incarnent des modes de vie traditionnels présentant un intérêt pour la conservation et l’utilisation durable de la diversité biologique et en favorise l’application sur une plus grande échelle, avec l’accord et la participation des dépositaires de ces connaissances, innovations et pratiques et encourage le partage équitable des avantages découlant de l’utilisation de ces connaissances, innovations et pratiques ».
Le second article oblige chaque pays à protéger et à encourager l’usage coutumier des ressources biologiques conformément aux pratiques culturelles traditionnelles compatibles avec les impératifs de leur conservation ou de leur utilisation durable. Cela veut dire que chaque pays est maître de ses ressources génétiques et à ce titre, le partage des avantages issus de l’utilisation de ces ressources génétiques doit se faire équitablement entre partenaires et en prévenant toute surexploitation. Mais ces règles ont-ils toujours été respectées ?
De quoi s’agit-il en fait ?
Il s’agit de la bio piraterie que le protocole de Nagoya est venu réglementer. Selon Barbara Lassen de l’ONG Nature Justice, l’équation est simple : « si des connaissances sont utilisées pour développer de nouveaux produits, une partie des avantages doit revenir à la communauté locales ». Elle se réjouit du fait que les ONG aient mis en place, ce qu’elle appelle « le protocole communautaire ».
C’est un document qui met en avant les richesses culturelles et naturelles d’une communauté, qui met en avant les règles traditionnelles et nouvelles d’une communauté par rapport à l’accès à ces ressources et à ces connaissances et qui met en avant les droits que cette communauté dispose par rapport à la loi nationale et internationale et qui fixe les règles.
A partir de là, les détenteurs des connaissances locales et les communautés locales doivent s’organiser d’une certaine manière sur les conditions d’accès à leurs ressources, a ajouté Barbara Lassen.
Les défis
A l’ouverture des travaux justement, le Maire de la Commune de Zogbodomè, une localité située à une centaine de kilomètre de Cotonou, est venu plaider pour les forêts marécageuses de Hlan. Un écosystème qui regorge d’énormes ressources biologiques dont dépend la survie des populations riveraines qui en tirent l’essentiel de leurs revenus.
Au nombre des dispositions prises par Monsieur David Zinsou Towèdjè pour sécuriser cette ressource naturelle, on peut citer la prise d’un acte pour conférer un statut traditionnel à cet écosystème. Résultat, ce dernier jouit désormais d’une protection à partir des valeurs endogènes avec l’existence de rites et interdits sur certaines ressources.
Tout en saluant le Secrétariat de la Convention sur la Diversité Biologique, le Maire, a pris, au nom de ses populations l’engagement d’une meilleure gestion de ce patrimoine.
A sa suite, le Directeur Exécutif de l’ONG Nature Tropicale, Joséa Bodjrènou et Patrice Sagbo, qui ont, tous deux, déploré l’absence de volonté politique en matière de gestion des ressources naturelles et surtout la non mise en œuvre du protocole de Nagoya.
Le Point focal biodiversité, Gaston Akouèhou, a, pour sa part, souhaité que les communautés locales puissent comprendre l’enjeu que représente le protocole de Nagoya. Il est de leurs droits de protéger les ressources génétiques de leurs milieux mais il est aussi important que ces ressources servent à régler les problèmes d’aujourd’hui auxquels la science n’arrive pas à trouver des solutions à travers des règles bien définies qui profitent à tout le monde.
Maurice Gogan, un tradi praticien qui représentait l’Association de défense et d’exploitation de la tradition pour la santé des populations démunies a une idée du travail à faire. « Aujourd’hui, le travail à faire consiste à préserver ces ressources, à savoir les utiliser et à laisser une grande à la prochaine génération » et il ajoute, je cite, « il faut savoir que ces ressources sont nos connaissances, les connaissances endogènes. Ce sont les connaissances de nos communautés et ça ne nous appartient pas personnellement. Nous n’avons donc pas le droit de les brader ou de dire ces connaissances au premier venu ».
C’est là le défi, celui d’aider les communautés à mieux s’imprégner des règles encadrant la gestion de la biodiversité.