Par Rivonala Razafison, ANTANANARIVO
Le programme de formation multidisciplinaire en vue d’un master international en agroécologie, biodiversité et changement climatique (ABC) est désormais intégré dans les parcours académiques disponibles à l’Université d’Antananarivo.
L’initiative répond aux objectifs du “Plan directeur de la recherche sur l’environnement lié au changement climatique” édité en avril, selon les mots de Christian Ralijaona, secrétaire général du ministère malgache de l’Enseignement supérieur et de la Recherche scientifique, lors du lancement officiel du nouveau cursus le 24 septembre.
Le nouveau parcours s’adresse aux ingénieurs (agronomes et polytechniciens) et aux diplômés des sciences naturelles, des sciences humaines et sociales désirant préparer des masters de référence à vocation nationale et internationale.
Des étudiants venus d’Afrique sub-saharienne figurent parmi les sélectionnés pour constituer la première promotion présentée au public à cette occasion.
Des chercheurs rattachés à des institutions universitaires africaines (Cape Town, Afrique du Sud et Makerere, Ouganda) avec ceux de l’Ouest (France et Etats-Unis) interviennent pour animer les quatre semestres d’un cycle de formation.
De même, des scientifiques au sein des instituts et centres de recherche comme l’IRD et le CIRAD se joignent à eux dans l’esprit de la coopération Nord-Sud et Sud-Sud.
Au niveau national, des enseignants-chercheurs à l’Ecole supérieure des sciences agronomiques (ESSA, institution-hôte du programme à Antananarivo) et du Laboratoire des radioisotopes (LRI) se relaient pour l’essentiel de la tâche.
Les membres du Cercle de réflexion sur l’agroécologie et le changement climatique (CRACC, créé en 2009), sont également sollicités pour leur expertise dans les domaines concernés.
Le “master international ABC” est conçu selon les principes de la recherche-action au profit du développement durable en Afrique.
Un long cheminement a eu lieu avant son lancement officiel, selon Jeannin Ranaivonasy, un responsable du programme.
Son institutionnalisation est en effet une émanation du projet Adaptation au changement climatique en Afrique (ACCA) financé par le Centre de recherche pour le développement international (CRDI, Canada).
Exécuté par des chercheurs au LRI sur la Grande Ile en 2007-2010, ledit projet visait à identifier les contraintes et les opportunités liées au changement climatique.
“Nous avons constaté qu’il manque beaucoup de capacités à Madagascar. Nos abondantes ressources ne sont pas mises en valeur au profit de la population. Il est aussi primordial de promouvoir la bonne gouvernance”, souligne Lilia Rabearisoa, directrice du LRI.
Hery Razafimahatratra, un enseignant-chercheur à l’ESSA, rappelle que l’agroécologie constitue un ensemble de pratiques agricoles ordinaires formant actuellement une discipline scientifique à part entière, un mouvement paysan ou un mouvement social.
Il s’agit de bien gérer les éléments naturels en symbiose dans le processus de production en vue de la conservation, de la fertilité des sols et de bons rendements.
“Trop de pertes, de dégradations et de perturbations sont observées dans les paysages agricoles. Selon des études, 40 % des enfants malgaches n’auront pas d’ici des années la capacité de passer le baccalauréat à cause de l’érosion continue des conditions socioéconomiques des parents”, regrette Tahina Rakotondralambo, directeur du CRACC.
Mais cet expert prend aussi la liberté d’énumérer les expériences prometteuses en matière d’agroécologie dans l’océan Indien et en Afrique où le Soil Carbon Network for Sustainable Agriculture in Africa (CaSA) œuvre dans ce sens.
En saisissant la richesse de la biodiversité des pays, les bonnes pratiques agricoles permettent de renforcer les capacités d’adaptation des paysans exposés à une vulnérabilité grandissante.
Ces pratiques contribuent à l’atténuation des émissions des gaz à effet de serre, en sachant que le secteur agricole figure parmi les gros émetteurs.
Les paysans africains doivent profiter des opportunités offertes par le mécanisme de réduction des émissions dues à la déforestation et à la dégradation plus la conservation (REDD+), en vogue dans les pays pauvres aujourd’hui, et la disponibilité des différents fonds climatiques au niveau mondial.
“Madagascar est un laboratoire à l’échelle réelle pour la formation et la recherche dans le contexte actuel du changement climatique”, lance à ce titre Jean Rasoarahona, directeur de l’ESSA.
Quant au partenariat, les organismes comme la Fondation MacArthur et l’EduLink apportent leur soutien financier à la mise en place du master ABC à Madagascar.
L’Union africaine, par le biais du Nouveau partenariat pour le développement de l’Afrique (Nepad), et la Banque of Africa (BOA) Madagascar aussi ont exprimé leur volonté de s’impliquer pleinement.