Amnesty International a appelé le gouvernement centrafricain à confisquer les diamants vendus par les compagnies du pays, sans contrôle sérieux sur leur provenance, estimant qu’ils finançaient des milices armées responsables de massacres et de pillages.
« Le gouvernement devrait confisquer tous les diamants sales, les vendre et utiliser l’argent pour le bien public », juge Amnesty dans un rapport paru mercredi.
« Si des compagnies ont acheté des diamants de sang, elles ne doivent pas pouvoir en profiter », a souligné Lucy Graham, juriste à Amnesty. « Alors que le pays cherche à se reconstruire, les diamants doivent être une bénédiction, pas une malédiction ».
Le renversement en mars 2013 du président François Bozizé par une rébellion à dominante musulmane, la Séléka, a plongé la Centrafrique, ex-colonie française, dans la plus grave crise depuis son indépendance en 1960, déclenchant des tueries de masse entre communautés musulmanes et chrétiennes, en 2013 et 2014, dont le pays peine à se relever.
Avant les troubles, les diamants représentaient la moitié des exportations du pays.
D’après Amnesty, « il y a un fort risque » que le principal négociant du pays, Sodiam, ait amassé pendant le conflit quelque 60.000 carats de diamants, d’une valeur de 7 millions de dollars, ayant servi à financer les milices chrétiennes anti-balaka.
Les Nations unies ont déjà mis sur liste noire le 2e négociant du pays, Badica, et sa filiale belge Kardiam, pour trafic de diamants venant de mines contrôlées par l’ex-rébellion Séléka, dans l’est du pays.
En mai 2015, un représentant de la Sodiam à Carnot (ouest) a confirmé à Amnesty que la compagnie achetait des diamants dans l’ouest de la RCA malgré le conflit et les stockait en attendant de pouvoir les exporter.
L’interdiction d’exporter les diamants mise en place en mai 2013 doit être partiellement levée une fois que le gouvernement aura rempli les conditions du « processus de Kimberley », qui vise à stopper le commerce de diamants provenant des zones de guerre, précise Amnesty.
L’organisation appelle en outre les gouvernements et compagnies impliquées dans le commerce des diamants, comme de Beers et Signet, à soutenir une régulation plus stricte du secteur, soulignant que les violations des droits de l’Homme ne se produisent pas que dans les zones de guerre.
« Les grandes compagnies doivent regarder de près les abus commis tout au long de la chaîne d’approvisionnement, du travail des enfants à la fraude fiscale (…) et toutes les violations des droits de l’Homme et pratiques peu scrupuleuses associées aux diamants », conclut Lucy Graham.