Par Kané Illa
Au Niger, les femmes représentent 50,6% des 17.129.076 habitants qui constituent la population générale du pays, selon le dernier recensement effectué en 2012.
Malheureusement, ces femmes sont aussi les plus exposées aux effets du changement climatique, notamment celles qui vivent en milieu rurales et dont les principales activités sont l’agriculture et l’élevage domestique.
Ainsi, du fait des sécheresses cycliques, avec leur corollaire de déficits agricoles et fourragers, nombreuses sont les femmes rurales qui vivent dans un état d’extrême pauvreté.
Depuis quelques années, beaucoup de projets et Organisations non gouvernementales (ONG) aident ces femmes à s’adapter au changement climatique, à travers une gamme de stratégies. L’embouche ovine est une de ces stratégies dont les femmes se réjouissent le plus. Elle consiste pour un projet ou une ONG à distribuer des moutons à femmes qui les engraissent pour les revendre et utiliser une partie de l’argent pour poursuivre l’embouche et l’autre partie pour exercer d’autres activités génératrices de revenus.
«Un mouton payé à 40.000 FCFA (80 dollars US) peut, lorsqu’il est bien engraissé, être revendu à 100.000 FCFA (200 dollars US) ou même plus, surtout au moment de certains évènements comme la fête de la Tabaski où les moutons sont très prisés au Niger», affirme Garba Aboubacary, le Chargé d’appui-conseil du projet PANA (Programme d’Action National d’Adaptation) au niveau de la commune rurale de Roumbou, dans le département de Dakoro (région de Maradi).
Financé d’abord par le Fonds pour l’Environnement Mondial (FEM) puis par le CANADA, le projet PANA intervient dans le domaine de l’adaptation au changement climatique. Au niveau de ses huit communes d’intervention au Niger, il appuie les femmes dans l’embouche afin de les aider à faire face aux effets du changement climatique face auxquels elles restent l’une des couches les plus vulnérables.
«Après des enquêtes de terrain, nous nous sommes rendus compte que les femmes sont les principales victimes des effets du changement climatique puisqu’en cas de sécheresse et de mauvaise campagne agricole, les hommes les abandonnent dans les villages avec les enfants et partent en exode vers les centres urbaines du pays ou même à l’extérieur.
Ces femmes nous ont demandé de les appuyer à exercer des activités génératrices de revenus, sans être obligées de quitter leurs terroirs. C’est ainsi que l’activité d’embouche a été retenue comme la plus à même de permettre à la femme de s’autonomiser en peu de temps», explique Boubacar Aï, la chargée des questions du Genre au projet PANA.
Dans chacune de ses communes d’intervention, le projet octroie deux moutons à chaque femme préalablement identifiée comme très affectée par les effets des changements climatiques. La bénéficiaire élève ces moutons qu’elle revend au bout d’une période n’excédant pas six mois.
Elle utilise une partie de l’argent pour payer d’autres moutons moins chers qu’elle va élever et utilise l’autre partie pour mener d’autres activités génératrices de revenus comme le petit commerce.
«Au début nous étions pauvres comme des rats de mosquée. Pour payer du sel de 25 CFA il nous étions obligées de nous tourner vers nos époux qui eux-mêmes n’ont rien. Mais depuis que nous pratiquons l’embouche, notre situation s’est nettement améliorée. Grâce à l’argent que nous gagnons en vendant les moutons, nous arrivons à exercer d’autres activités qui nous procurent d’importants revenus. Cela nous met à l’abri des insécurités alimentaires qui nous ont fait souffrir les années antérieures. Aujourd’hui nous arrivons à compenser les pertes que nous subissons lors des campagnes agricoles soumises aux caprices du climat et nous traversons les périodes de soudure sans difficulté», témoigne Mariama Abdou, une des bénéficiaires des moutons distribués par le projet PANA dans le village de Gomozo situé dans le département de Dakoro (région de Maradi).
«A l’issue de plusieurs missions de suivi que nous avons effectuées sur le terrain, nous nous sommes effectivement rendus compte que l’embouche a eu des impacts positifs sur les conditions de vie de ces femmes qui sont très exposées au changement climatique. Nous avons remarqué que dans beaucoup de communes ces femmes sont même arrivées à ouvrir des comptes bancaires dans des institutions de la microfinance qui leur accorde des crédits pour exercer d’autres activités génératrices des revenus», se satisfait la chargée des questions du Genre du projet PANA.